Mercredi 21 juin, journée quasi caniculaire et pourtant la quarantaine d’adhérents ou sympathisants du CER Benjamin Bardy s’en est allée rencontrer trois philosophies de vie, symbolisées par trois édifices comme surgis de nulle part dans leur monumentalité …
C’est tout d’abord, au lieu-dit L’Engayresque (« lieu des sources ») dans les hauts cantons lodévois, le temple Lérab Ling construit et ouvert en 1992 pour préserver les traditions spirituelles, la culture et l’art uniques du bouddhisme tibétain. Béni par le Dalaï Lama, il se veut « un temple pour le Tibet et pour le monde ». Son plan respecte celui des plus beaux exemples encore existants dans l’Himalaya. Il offre tous les symboles extérieurs et intérieurs de cette philosophie - religion où chacun peut réaliser son potentiel d’éveil, rechercher le bonheur intérieur par la paix et la méditation. A l’intérieur de ce temple flamboyant, la grande statue de Bouddha veille...
Ensuite, cap vers l’abbaye de Sylvanès, dans un cadre naturel et patrimonial d’exception en pays aveyronnais. Depuis sa fondation en 1136 par Pons de l’Héras, malgré les vicissitudes et tourments de l’Histoire, ce joyau de l’art cistercien offre toujours aujourd’hui église abbatiale (architecture épurée et acoustique exceptionnelle), galerie-est du cloître, salle capitulaire, scriptorium…Labellisée depuis 2015 « centre culturel de rencontres », elle a, au cœur de son projet, la musique et le dialogue des cultures. L’Association des Amis de l’Abbaye de Sylvanès créée, il y a 40 ans par le père Gouzes, a tenu ses promesses pour une renaissance spirituelle et culturelle des lieux, véritable illustration de développement local en milieu rural…
Enfin, à quelques kilomètres de là, voici la chapelle orthodoxe russe ou « Eglise de l’Unité » ou « Etimasie du trône ». Construite en Russie, puis transportée et remontée en France, cette petite sœur des églises de Kijj du VII°, somptueuse au milieu des forêts, offre en son sein une belle iconostase, deux œuvres flamandes du XV° et un Christ en bois du XII°. Mais elle est surtout le symbole même de l’œcuménisme puisque dédiée à la rencontre des religions…
Guidés dans chaque étape par des jeunes gens passionnés de ces lieux et « habités » par leur choix de vie respectif, les participants auront pu découvrir et s’enrichir de ces rencontres.
Puissent le vent qui passe dans les drapeaux de prières, les musiques traditionnelles ou sacrées qui rassemblent et les icônes millénaires qui instruisent, avoir pu permettre - même pour une journée- « d’oser croire que la beauté sauvera le monde »…
* Merci au président pour son implication et son exposé sur le Viaduc de Millau , à celles et ceux qui ont préparé la sortie et au groupe très intéressé, attentif et joyeux…Formidable !
Galerie photos... Le groupe...
POUR ALLER PLUS LOIN...
... Lérab Ling
Le bouddhisme tibétain s’est développé à partir du VII° siècle. Boudha n’est pas vénéré comme un Dieu, un saint mais comme le Sage ultime, comme la personnification de l’Eveil.
Le mot sanscrit Bouddha est traduit en tibétain «sanguié » : « sang » : il a « dissipé » tout ce qui voile la connaissance et il s’est « éveillé » de la nuit de l’ignorance et « guié » : il a « développé tout ce qui est à développer c’est-à-dire toutes les qualités spirituelles humaines de connaissance et de compassion.
Les toits en cuivre et les couleurs très vives sont le rappel du 1° monastère tibétain.
L’entrée est toujours au nord ; elle porte tous les symboles «auspiciens » avec un texte souhaitant la bienvenue à qui franchira ce lieu.
Les deux cervidés encadrant une roue en or- elle symbolise la parole de Bouddha – font référence à l’« éveil » et au premier enseignement de celui-ci.
Ces 2 statues de Bouddha, en pierre rouge d’un petit village hindou, sont exceptionnelles :
- un bouddha ascétique qui rappelle une étape capitale de sa vie, celle occupée par la méditation après ses rencontres avec la guerre, un malade, un cadavre et un ermite,
- un bouddha debout qui enseigne à ses 8 « fils » les plus proches…
Deux « stupa » ou monuments funéraires et puis, au milieu du lac, c’est le maître aux grands pouvoirs de guérison, 2° statue de Bouddha venue directement d’Inde après celle, géante, qui trône à l’intérieur du temple.
Celle-ci de 7 mètres de hauteur est la réplique exacte de la statue la plus sacrée de Badiya en Inde. Elle a été réalisée en Birmanie et renferme des mandalas, des paroles du Bouddha, et surtout des reliques offertes notamment par le Dalaï Lama, revenu bénir l’ensemble en 2008.
Les célébrations matinale et vespérale réunissent dans le temple les communautés laïque et monastique (une dizaine de moines et de nonnes) auxquelles peut se joindre toute personne venue là pour une pause ou se ressourcer quelle que soit sa tradition spirituelle ou ses croyances.
... Abbaye de Sylvanès
Près de 900 ans d’histoire de sa fondation (en 1136) au déclin puis vers la renaissance pour être, aujourd’hui, un centre culturel de rencontre avec au cœur de son projet la musique et le dialogue des cultures.
L’abbaye est construite sous la forme d’un plan type cistercien. Il est défini selon une symbolique bipolaire avec l’orientation de l’église à l’est et l’absence de toute décoration.
L’ordre monastique cistercien est fondé au XI° dans un grand mouvement de réforme et adopte une vie rude, réglée par huit heures de prières et de chant quotidiens qu’accompagne le travail manuel.
* L’abbatiale construite en grès remplacé dans sa partie supérieure par du tuf dont la porosité absorbe en partie l’écho et favorise l’acoustique exceptionnelle du lieu.
Ce qui saisit, dès l’entrée, c’est la nef, ample et lumineuse ! Elle est l’une des nefs romanes les plus larges de France ! Sa hauteur sous voûte (18m) – en arceau brisé - égale approximativement sa largeur (14m).
Les ouvertures du choeur sont au nombre de 7 en référence aux 7 jours de la Création. Présence symbolique de la Vierge Marie, protectrice de l’ordre de Citeaux.
Le grand orgue construit entre 1994 et 1997 (30 000 heures de travail) a été dessiné et réalisé par le facteur d’orgues Daniel Birouste. Le buffet est en châtaignier naturel de 12m de haut pour 9m de large et 3m de profondeur. L’orgue détient près de 5000 tuyaux donnant chacun une note et un son différents.
Les vitraux vont peu à peu être remplacés afin de retrouver leurs caractéristiques premières et donner encore plus de luminosité.
* Le cloître : il ne subsiste du quadrilatère initial qu’une seule galerie, elle-même incomplète. D’une grande sobriété, les colonnes tantôt cylindriques et tantôt octogonales sont jumelées et coiffées de chapiteaux épannelés.
*Le scriptorium : salle de travail des moines copistes, il abritait aussi la bibliothèque. Même esprit architectural que dans le transept mais avec de réelles croisées d’ogives.
* La salle capitulaire ou « salle du chapitre » était le cerveau de l’abbaye et le lieu des décisions importantes liées à sa gestion. Construite au XII°, elle est transformée en salon au XVII° ce dont témoigne l’enduit aux décors de gypseries et de stucs ! Elle contraste encore aujourd’hui avec la simplicité originelle conservée des autres bâtiments…
« Il y a 40 ans, nous nous lancions dans la folle aventure de sauver l’ancienne Abbaye de Sylvanès. Pour nous, il ne s’agissait pas seulement de restaurer des pierres, si belles soient-elles !
A l’écoute de leur message spirituel enfoui , tels les sourciers de notre pays, nous voulions surtout en faire rejaillir la vie.
A la suite des moines cisterciens, à leur exemple, mais pour notre temps, pour demain si proche, nous avons retissé les liens vivants de la spiritualité et de l’art, de la nature et de la culture.(…)Un projet qui s’articule autour de la musique et du dialogue des cultures avec pour objectifs majeurs « expérimenter, partager, transmettre. »
( Père André Gouzes, président d’honneur de l’Association des Amis de l’Abbaye de Sylvanès / Christine Rouquairol, présidente de cette association / Michel Wolkowitsky, directeur général et artistique , maire de Sylvanès).
40 ans de musiques à l’Abbaye de Sylvanès…Festival de musiques sacrées , musiques du monde du 09 juillet au 27 août 2017
... Chapelle orthodoxe russe
Cette église en bois de style orthodoxe est haute de 27m pour une superficie au sol de 300m2. Elle fut fabriquée en Russie en 1993 et ramenée, en pièces détachées, vers la France (grâce au mécénat de la SNCF) en juillet jusqu’à la gare de Millau. Pendant 6 mois, 7 jeunes russes et des artisans et des paysans du pays la remontèrent.
* L’iconostase : de « eikonostasion » ou « images dressées », cloison de bois ou de pierre qui,dans les églises orthodoxes, sépare les lieux où se tient le clergé célébrant du reste de l’église où se tiennent le chœur et les fidèles. Elle est ici en bois.
* Elle est dédiée à la rencontre des religions et à l’œcuménisme comme en témoignent les chapelles latérales orthodoxe et catholique encadrant le sanctuaire qui abrite l’autel.
* A remarquer le Christ en bois du XII°(acheté par le père André Gouzes)
« Dès le début de sa formation le Centre des Rencontres spirituelles et culturelles de l’Abbaye de Sylvanès accorde une place importante à la culture russe et à la tradition orthodoxe. Des liens se créent entre le père André Gouzes, Michel Wolkowitsky et Mgr Alexandre Moghilev, évêque de Kostroma…Cette chapelle est donc le symbole d’histoires de rencontres et d’amitié, d’échanges culturels et spirituels dans un esprit d’œcuménisme. »
(Propos introductifs du guide, jeune séminariste orthodoxe)
Texte : © P.Oziol / Sources : site internet de l’Abbaye de Sylvanès, dépliants proposés dans chaque lieu, notes manuscrites, panneaux explicatifs…
Photos : © CER,© JM Bonnal,© D.Mathieu.
Bibliographie :
AUSSIBAL Robert : l’abbaye de Sylvanès, architecture-symbolisme , collection Les Cahiers de l’Aveyron n°4, Millau, 1990.
AUSSIBAL Robert et GOUZES André o.p. : Sylvanès, collection Tourisme et Culture en Aveyron, Editions du Beffroi, Millau,1999.
CLÉMENT Olivier : L'Eglise orthodoxe, collection Que sais-je n°949, P.U.F., 2002 (réimpression).
Lama JIGMÉ Rimpoché et Dom LE GALL Robert, Le moine et le lama (entretiens avec Frédéric LENOIR), Editions Fayard, 2001.
RICARD Mathieu :Un demi-siècle dans l'Himalaya,Editions La Martinière, à paraître 05-10-2017.