Le Centre d’Etudes et de Recherches Benjamin Bardy (CERBB) a invité Marie-Hélène Astruc pour animer une conférence sur la vie rurale en Margeride. Native en haute Lozère, elle reconnait avoir été toujours curieuse du mode de vie de ses aïeules et aïeux. Des illustrations bien choisies ont agrémenté son exposé.
Une première partie de cette conférence s’est déroulée ce mercredi 13 novembre 2024 à la salle Urbain V devant un public près de 120 personnes. La conférencière a invité l’assemblée à pénétrer dans l’ousta, la cellule de base de la vie rurale. Marie-Hélène Astruc a défini l’ousta, comme une entreprise familiale, à la fois agricole et artisanale, avec la préoccupation quotidienne de la faire prospérer. L’évolution de l’habitat rudimentaire contre les chaos de granite, s’est améliorée jusqu’à devenir ousta. Les différents types d’oustas ont été décrits, le plus sommaire, dans lequel hommes et bêtes partageaient le même espace, l’ousta moyen et toutes ses variantes, du plus modeste au plus aisé, la séparation des bêtes et des hommes, puis les oustas riches, qui se découvrent isolés, à l’écart des hameaux.A l’ousta, on vivait en autosubsistance, les revenus provenaient de l’artisanat lainier. En Margeride, il y avait des moutons, des bêtes à laine partout, de l’ousta le plus pauvre (3 à 5 moutons) à l’ousta moyen et le plus aisé (20 à 30 moutons. Trois générations vivent à l’ousta, Elle et Lui, les maîtres qui gouvernent, le pépé et la mamet, les frères et sœurs de l’héritier, les enfants, la servante, le valet, quelques journaliers à la belle saison, et le berger. La patronne gouverne la gent féminine, le maître, la masculine, discutent ensemble les grandes décisions. Ils observent leurs enfants grandir, lequel, ou, laquelle montrera le plus d’aptitude pour leur succéder. Une égalité homme – femme ? Madame Astruc a évoqué cette particularité de la Margeride quant à la transmission de l’ousta, cette absence totale de règles qui régit la donation préciputaire et tous les enjeux d’une succession réussie. Elle a cité les études menées par les ethnologues P. Lamaison et E. Claverie sur la paroisse de Ribennes et les paroisses voisines. Selon tous les actes et documents étudiés, il ressort que dans 47 % des cas, une fille était héritière. L’ainé(e) n’héritait que lorsqu’il y avait urgence, quand les parents ne pouvaient plus faire face aux responsabilités de l’ousta. L’héritier(e) est le premier à se marier, la succession se fait le jour du mariage. On se marie généralement en février, quand la charge de travail se fait moindre, dans la paroisse ou les paroisses voisines. On pratique une stratégie de circulation des dots parmi les ousta alliés, celle-ci est constituée en partie d’un crédit en circulation, en partie en nature et le reste en monnaie. On veille à bien respecter les règles de l’église quant à la consanguinité…
De nombreux aspects du quotidien ont été abordés, le froid, l’alimentation, les relations avec la communauté villageoise, la place de l’Eglise, l’importance des foires, encore peu nombreuses dans l’Ancien Régime, on n’en manquait aucune … la rudesse de la vie liée au célibat, la pauvre fille, non mariée, qui se retrouve enceinte.